Si comme moi vous suivez quotidiennement le parcours de Bula sur MarineTraffic, vous avez pu observer la bizarrerie suivante :
Selon le site, Bula est planté depuis six jours au sud-sud-est de Ribeira Grande. Apparemment, l'équipage fait des quarts de sieste à la cape. Je me trouve donc face à un dilemme : croire la flèche rose ci-dessus, émanant d'un site sérieux en charge de la sécurité des navires, ou me fier au blog de Philippe, qui indiquait samedi 22 novembre - à l'heure où j'écris ces lignes car je prends de l'avance sur l'édition de mes articles - la position ci-après, tout en envisageant le fait qu'il puisse nous raconter des craques (dans l'éventualité où l'ensemble de l'équipage déciderait de brouiller les pistes et d'aller mener une nouvelle vie sous le soleil exactement ; ça s'est vu, avec ou sans cadavre coulé dans le béton de la cave).
La troisième explication est moins sympathique : Bula serait bien sous le Cap Vert, comme l'indique Marine Traffic, mais à une altitude négative, en raison d'une rencontre avec un OFNI ou un OANI. Pour les lecteurs peu familiers des faits nautiques, l'OFNI est un objet frappant flottant non identifié, l'OANI étant une observation aquatique non identifiée. On dit "un" OANI quand même.
Je sens les linguistes qui frémissent. Premièrement, percuter une observation reste pour moi assez abstrait : je me demande comment heurter un concept pourrait faire couler un bateau, mais soit, admettons l'assimilation du mot "observation" à "objet", ce qui aura aussi pour effet de justifier le genre masculin de l'OANI (du reste, il semblerait qu'on rencontre le terme dans la littérature maritime).
En second lieu, comment un navire, lui-même flottant (sauf certains modèles), pourrait-il rencontrer un objet aquatique non identifié non flottant (car, s'il flottait, il devrait en toute logique être qualifié de flottant, et s'il ne flottait pas, il serait inoffensif et ne ferait l'objet d'aucune terminologie angoissante, donc d'où ça sort, cet OANI ?), re-point d'interrogation : ? On sent dans la dénomination de l'OANI une petite gêne acronymique des autorités maritimes, mais bon, tout le monde ne peut pas être Alain Rey. Bateaux.com tente d'éclaircir les termes : l'OFNI est un objet flottant, donc pas du tout ou partiellement immergé ; l'OANI, quant à lui, ne flotte pas toujours à la surface et peut être totalement ou partiellement sous l'eau. Le site n'est en rien responsable de ces définitions (limpides) et se dépatouille comme il peut avec ce qu'on lui a donné. Mais ce n'est pas tout. Je cite : "bien que le terme soit parfois associé à des phénomènes inexpliqués, la
majorité des incidents impliquant des OANI peuvent être attribués à des
objets connus, mais mal identifiés sous l'eau". Les OFNI sont donc parfois des OANI en raison de leur immersion partielle, quand les OANI peuvent être connus donc identifiés (et sont alors des OAI, que nous prononcerons "why", comme "pourquoi moi, seigneur Jésus ?").
Ben voilà, on a tout compris.
Mais si Bula gît par 4000 m de fond, qui écrit le blog de Philippe, alors ?

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire